Le retour

Nous repartons de Zeebrugge le 4 septembre dans la matinée pour pouvoir profiter de toute la durée du courant favorable. Nous devons attendre une vingtaine de minutes qu’un cargo gazier manœuvre avant d’avoir l’autorisation de quitter le port. Nous naviguons au début au moteur car le peu de vent qu’il y a est plein de face, le vent cède un peu au cours de la journée et nous finissons par arriver à Dunkerque à la voile. Nous nous amarrons à la Marina du Grand Large aménagée dans un bassin tout au fond du port où un grand ponton visiteur nous accueille.

Nous repartons dès le lendemain matin pour Boulogne tout au moteur, il n’y a pas de vent ! Que ce port est moche et sale ! C’est quand même attristant qu’il faille arriver en France pour trouver un port aussi sale ! Des fientes de mouettes sur les pontons, une eau huileuse noire pleine de détritus et malodorante ! C’est quand même la France qui a inventé la label Pavillon Bleu ! Nous ne nous attardons pas non plus à Boulogne, le port n’est vraiment pas engageant et j’ai trop mal au genou pour une découverte de la ville.

Le lendemain, c’est par une navigation assez fatigante que nous nous dirigeons vers Dieppe. Le vent est en plein de face, nous tentons de tirer des bords mais ce n’est pas concluant, nous n’avançons pas. Nous partons donc au moteur avec 15-20 nœuds de vent de face et un bon clapot qui nous secoue pas mal. Heureusement en cours de journée le vent tombe et nous arrivons à Dieppe sous un gros orage qui rince bien le bateau éclaboussé d’embruns.

A partir de Dieppe nous entrons dans la phase nostalgie, souvenirs. Dieppe était le point de chute de nos envies de grand air iodé lors de ma jeunesse parisienne. Nous faisions 1h et demie de route et pouvions respirer le bon air de la mer ! Nous restons trois jours à Dieppe. Nous avons la visite de la famille rouennaise en la personne de Patrick, mon presque frère. Dieppe s’est embellie par rapport à mes souvenirs. Les belles maisons bourgeoises qui datent de Louis XIV, du temps de l’enrichissement des villes portuaires grâce aux armateurs et au commerce avec les Indes, ont été restaurées et les vieux quartiers réhabilités. Nous arpentons avec plaisir les rues commerçantes, reprenons contact avec la culture française, dégustons des fruits de mer. Le 10 septembre nous pouvons reprendre notre chemin, après le passage d’un épisode bien venté, qui nous a permis d’admirer La Manche déverser ses rouleaux sur la belle plage de Dieppe. Ce samedi il y a une manifestation de cerfs-volants sur la plage que nous pouvons admirer depuis la mer.

Nous arrivons à Fécamp en fin d’après-midi à marée basse pour nous amarrer au ponton visiteur bien occupé par une multitude de semi-rigides qui participent à une manifestation de pêche. Notre neveu Damien et sa compagne Marine font un saut depuis Rouen pour diner avec nous. Quel plaisir !

Nous repartons dès le lendemain en direction de l’Ouest. Un petit vent de Sud-Est nous permet d’envoyer le gennaker une bonne partie de la traversée, qui se termine au moteur faute de vent. Nous mouillons devant l’ile de Tatihou pour attendre l’ouverture des portes de Saint-Vaast-La-Hougue. Souvenirs, souvenirs ! Saint-Vaast fut notre port d’attache pendant 25 ans avec notre premier bateau. Quel plaisir de retrouver l’ambiance saint-vaastaise et nos amis de toujours qui nous attendent de pied ferme ! Nous passons deux jours avec Francette et Christian à évoquer le bon vieux temps, profiter de baignades à la Pointe de Saire, faire quelques courses, regarder passer le bateau à roulette qui amusait tant notre fils Guillaume, diner chez Marie et Alain au cœur du Cotentin, revoir Véronique et Philippe. Que ce coin est beau et plein d’une partie de notre vie ! Malheureusement nous ne pouvons pas nous attarder plus, un créneau se profile dans deux jours pour passer le Raz Blanchard dans de bonnes conditions.

Nous repartons donc le 14 septembre après-midi en direction de Cherbourg, une petite promenade en ville, et nous reprenons notre route le lendemain à 13 heures en direction de l’Ouest. Nous avons un vent de Nord-Ouest qui nous oblige à remonter au moteur jusqu’à la Basse Breford au large d’Omonville.

Là nous pouvons abattre et envoyer le génois pour une navigation plein Ouest, au près un moment, car il ne faut pas se faire entrainer trop vers le Sud par le courant très fort du Raz Blanchard. Nous sommes un peu secoués par les remous au Nord de la Hague, mais cela ne dure pas. Nous passons à l’Ouest de Guernesey et nous pouvons abattre un peu vent de travers ; et la nuit tombe. Le début de la nuit est agité car le vent forcit un peu, et nous devons prendre un ris vers minuit. Le vent mollit en cours de nuit et au lever du soleil les conditions sont bien agréables, malgré le froid.

Nous arrivons à l‘Aber Wrach en milieu de journée sous un beau soleil. Cette escale est encore l’occasion de joyeuses retrouvailles avec de vieux amis qui vivent maintenant dans la région. Nous passons une journée chez Janine et Michel qui nous amènent visiter la plage et le sémaphore de Brignogan, la chapelle Saint-Pol, le site de Meneham qui retrace la vie des pêcheurs, agriculteurs, goémoniers du début du siècle dernier. Nous dégustons un « fish and chips » maison chez Nicole et Serge et avons aussi le plaisir de voir leurs enfants Isabelle, Guillaume et Margot. De bien agréables moments !

Nous quittons l’Aber Wrach le 19 septembre pour une navigation, bien tranquille en cette période de petites marées et de petit temps, pour rejoindre Camaret. Nous mouillons au fond de la baie à l’abri du vent d‘Est, devant une jolie plage. Nous repartons dès le lendemain matin pour un longue étape, moitié sous gennaker moitié au moteur, et arrivons assez tard à Lesconil. Le port est plein car le bureau étant fermé, c’est gratuit ! Je soupçonne certains d’en profiter car ce n’est habituellement pas aussi fréquenté à cette saison. Nous retrouvons Véronique et Yvon, des navigateurs bretons que nous avions rencontrés aux Bermudes lors de notre premier voyage, avec lesquels nous avions sympathisé et étions restés en contact. Nous passons une agréable soirée avec eux en partages de souvenirs et d’expériences. Le lendemain matin après un petit tour au marché de ce charmant petit port nous repartons vers le Sud. Nous tirons des bords pendant deux heures, puis vaincus par le manque de vent rejoignons Port-Louis au moteur.

Une courte escale d’une nuit et c’est reparti pour une belle escale au moteur, faute de vent pour rejoindre La Vilaine. Nous remontons la rivière dans l’après-midi, et retrouvons Muriel et Jean-Luc qui nous attendent de pied ferme. Les installations d’attente sont bien encombrées car les éclusages sont restreints à cause de la sécheresse. Il faut descendre du ponton d’attente en annexe pour enfin trinquer avec nos amis. Nous passons l’écluse d’Arzal le vendredi 23 septembre à 11 heures et sommes accueillis par Isabelle et Henri qui ont rejoint nos amis pour une belle journée de retrouvailles. Merci les amis, de votre chaleureux accueil !

Nous venons de boucler un beau voyage de 3125 milles dans le Nord de l’Europe. Les voyages se suivent mais ne se ressemblent pas, c’est ce qui en fait la richesse ! Une périple bien moins dépaysant que le premier, bien moins riche en rencontres du fait du climat qui n’incite pas à trainer dehors, et probablement du caractère plus réservé des gens du Nord. C’est peut être ce point que nous regretterons le plus. Bien que nous ayons souffert du froid et de la pluie en Ecosse, nous avons tellement apprécié ses paysages magnifiques. Nous n’ayons pas poussé très au Nord en Norvège et avons manqué de ce fait les fjords les plus spectaculaires, mais nous avons aimé cette côte très découpées avec ses îles à n’en plus finir, ses sites et maisons typiques. Le parcours de la Mer Baltique au Danemark et en Allemagne permet une navigation pépère dans une ambiance tranquille après les conditions plus musclées plus au Nord. Les visites d’Oslo et de Copenhague nous ont vraiment emballés, ces villes sont très attrayantes.

 Nous rentrons la tête encore pleine de souvenirs et de beaux paysages. Nous sommes heureux de retrouver famille et amis après ces cinq mois d’absence. Free Vikings, son problème d’arbre d’hélice résolu, rentre en bon état ;  et son équipage, après quelques réparations, pourra bientôt repartir en pleine forme pour de nouvelles aventures. Merci à tous les équipages pour leur présence chaleureuse et conviviale et à tous nos lecteurs pour leurs encouragements .